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Philosophie

Le surhomme de Nietzsche, facile à comprendre

Quand on s’intéresse à la philosophie de Nietzsche, le concept du « Surhomme » est inévitable. Mais le problème, c’est que ce concept passionnant a été repris à toutes les sauces : le « Surhomme » est même passé dans le langage courant.

Selon le Larousse, un surhomme est un « être humain pourvu de dons intellectuels ou physiques exceptionnels. »

Vous l’aurez compris : au fil du temps, le Surhomme de Nietzsche a été bien déformé. Mais rassurez-vous, si vous restez en ma compagnie, vous allez enfin tout comprendre le surhomme tel que Nietzsche l’a théorisé.

Commençons dans l’ordre. Dans quel contexte Nietzsche se met à penser au Surhomme ?

On est au XIXe siècle et la société dans laquelle vit Nietzsche est pleine de changements.

En quelques années, il y a l’industrialisation qui modifie totalement le rapport des hommes au travail ; il y a les progrès de la science et de la médecine qui apportent une nouvelle vision de la vie et du vivant…

Mais Nietzsche observe tout cela avec un œil critique. Il réalise que le progrès est devenu la nouvelle religion, et de là, il affirme que ce progrès a créé un nouveau monde : un monde sans Dieu.

Oui, à ce stade-là, vous avez certainement en tête la célèbre citation de Nietzsche : « Dieu est mort » ; et vous avez fait la bonne connexion. Car c’est suite à ces changements majeurs de la société que Nietzsche parle de la mort de Dieu.

Il déclare que ce nouveau monde a tué Dieu. Autrement dit que la religion a été détrônée par le progrès. Si vous souhaitez en savoir plus sur cette citation de Nietzsche, j’ai écrit un article dédié à ce sujet : « Dieu est mort : pourquoi Nietzsche a dit ça ? ».

La religion, le Surhomme… quel rapport ?

Vous allez vite comprendre.

D’abord il faut savoir que Nietzsche n’est pas très copain avec la religion. Il a pourtant été élevé dans une famille très pieuse (Nietzsche voulait même être pasteur comme son père), mais avec les années il s’est détaché de la religion et a fini par la considérer comme le pire des fléaux.

Selon lui, la religion emprisonne les hommes, car ils sont soumis aux croyances et à la morale religieuse qui leur dictent comment il « faut » vivre et se comporter. De ce fait, les hommes sont incapables de vivre la vie dont ils rêvent… Voilà pourquoi Nietzsche considère que la religion empêche les hommes d’être libres et heureux.

« La notion de « Dieu » a été inventée comme antithèse de la vie. »

Nietzsche, Ecce homo

Alors la mort de Dieu, c’est une bonne nouvelle me direz-vous ? Les hommes vont retrouver leur liberté ?

C’est également ce que se disait Nietzsche dans un premier temps. Il pensait que la mort de Dieu allait libérer les hommes des injonctions religieuses, et qu’ils allaient enfin s’épanouir pleinement.

Mais très vite, Nietzsche réalise que c’est loin d’être le cas : malgré cette société nouvelle pleine de progrès, les hommes continuent à vivre soumis aux vieux codes, avec l’ombre d’un Dieu mort au-dessus de leur tête.

Pourquoi ? Eh bien, car ce nouveau monde n’a pas résolu le problème de l’existence humaine. Il n’a pas donné aux hommes la force de vivre sans l’aide de Dieu. Il n’a pas donné plus de sens à leur vie.

Voilà pourquoi les hommes ont besoin de se rattacher aux croyances religieuses pour les aider à vivre en cas de coups durs, et à surmonter le lourd poids de leur existence qui pèse sur leurs épaules.

Nietzsche craint alors le pire…

En analysant tout cela, Nietzsche est inquiet car :

  1. Soit les hommes continuent à vivre soumis aux vieux codes religieux dont ils deviennent esclaves.
  2. Soit ils se sont détachés de Dieu et de la religion, mais ils ne croient plus en rien. Ils mènent une vie vide de sens, et se morfondent dans le nihilisme.

Le nihilisme, c’est le rejet radical de toute valeur. Autrement dit, les hommes ne croient plus en rien, ni en eux-mêmes. C’est le vide total. Et c’est justement cela qui inquiète Nietzsche, car pour lui une société d’esclaves ou d’hommes faibles est source de danger. C’est la porte ouverte au chaos. Voilà pourquoi Nietzsche est persuadé que les hommes doivent se reconstruire et réinventer des nouvelles valeurs pour survivre à la mort de Dieu.

Comment survivre à la mort de Dieu ? La solution de Nietzsche : le surhomme.

Toute cette réflexion, Nietzsche la développe dans son célèbre livre Ainsi parlait Zarathoustra. Et c’est là qu’il trouve la solution : le Surhomme.

Pour ne pas sombrer dans le chaos, Nietzsche invite alors les hommes à reprendre le contrôle de leur vie et à prendre conscience de leur toute puissance, pour devenir des Surhommes — qui n’attendent pas d’être au paradis pour être heureux.

Pour se reconstruire et devenir un Surhomme, l’homme doit alors passer par trois étapes. Dans Ainsi parlait Zarathoustra, Nietzsche parle des « trois métamorphoses » :

  • L’homme sera d’abord chameau : le chameau symbolise la bête qui transporte ses valeurs sans réfléchir. C’est l’image de l’esclave.
  • Ensuite le chameau devient lion : le lion représente la révolte contre les valeurs traditionnelles. Il dit “non” et devient l’ennemi des dieux.
  • Enfin, le lion devient enfant : l’enfant, c’est l’image de la renaissance pour se construire une nouvelle connaissance et une nouvelle morale.

Et après ?

Une fois ces trois étapes passées, l’homme devient alors Surhomme. Le Surhomme est un homme qui a appris à vivre sans l’aide de Dieu. C’est un nouvel homme plus fort et totalement libre, car il refuse la soumission à des codes ou des croyances dépassés.

Le Surhomme n’est plus la marionnette d’un Dieu : il est son propre Dieu. Il sait qu’il est le seul à avoir son destin entre ses mains, qu’il est le seul responsable de sa vie, de son bonheur. Chaque jour, avec force et courage, le surhomme surmonte ses peurs, affronte ses démons, maitrise ses émotions et ses passions tristes dans le but de se créer la vie qu’il souhaite.

Voilà donc le projet de Nietzsche… En créant le Surhomme, Nietzsche voulait transformer les hommes, les rendre plus forts, et surtout plus libres.